Plan national covoiturage : le GART émet des propositions

Dans la dynamique des Assises nationales de la mobilité et de la présentation du projet de loi d’Orientation des mobilités (LOM), la Ministre des Transports a convié des représentants des collectivités territoriales, des start-ups de covoiturage et des employeurs à la réunion de lancement du Plan national pour le covoiturage courte-distance.
Cette réunion, qui s’est tenue le 11 décembre 2018 à Paris en présence du GART, a été l’occasion pour chaque acteur présent de faire part de ses propositions pour accélérer la diffusion du covoiturage courte-distance auprès des entreprises dans le cadre des déplacements domicile-travail, ainsi que dans les territoires peu ou pas desservis par les transports publics.
Lors de cette réunion, le GART a proposé que la loi d’Orientation des mobilités contienne a minima plusieurs dispositions – référencées et détaillées ci-après – seules à même de permettre aux autorités organisatrices de la mobilité (AOM) d’atteindre des objectifs de report modal plus ambitieux en matière de covoiturage.

Les 9 propositions formulées par le GART
Proposition n°1
Confier aux AOM la compétence pleine et entière d’organiser des services de covoiturage (proposition reprise dans le projet de loi LOM).

Proposition n°2
Permettre aux AOM de réserver des voies au covoiturage et leur donner les moyens de contrôler efficacement leur usage, que ce dernier soit réalisé par l’intermédiaire de plateformes numériques ou qu’il soit simplement informel (entre amis, entre collègues…). De ce fait, l’outil de contrôle-sanction doit permettre de mesurer avec une grande fiabilité le nombre d’occupants d’un véhicule, et d’émettre automatiquement des PV à l’encontre des contrevenants (proposition reprise dans le projet de loi LOM).

Proposition n°3
Flécher vers les AOM tout ou partie du produit des amendes recouvrées en cas d’infraction à l’utilisation d’une « voie réservée au covoiturage ».

Proposition n°4
Permettre aux AOM de déroger, sous certaines conditions, à certaines contraintes des marchés publics lorsqu’elles souhaitent expérimenter des services de covoiturage proposés par des start-ups. En effet, ces services nécessitent une réactivité et une flexibilité qui s’accommodent mal des contraintes administratives inhérentes à la commande publique.

Proposition n°5
Rendre le forfait « mobilités durables » prévu par le projet de loi LOM cumulable avec le remboursement de la moitié de l’abonnement au réseau de transport en commun (prime transport).

Proposition n°6
Que la LOM oblige l’État à développer un registre de « preuves de covoiturage », chargé de centraliser en temps réel l’ensemble des trajets de covoiturage réalisés sur les différentes plateformes numériques publiques et privées. Les AOM pourront interroger ce registre en tant que de besoin, de sorte par exemple à s’assurer qu’un véhicule donné est bien autorisé à bénéficier d’une incitation de type « stationnement réservé au covoiturage ».

Proposition n°7
Permettre aux AOM de subventionner directement les covoitureurs (passagers ou conducteurs), selon des conditions restant à affiner par décret, afin de prendre en charge une partie des frais qu’ils ont engagés (proposition reprise dans le projet de loi LOM). De cette manière, l’incitation à covoiturer serait très importante tout en n’obligeant aucun usager à passer par une plateforme d’intermédiation payante. Rien n’empêcherait toutefois un usager de privilégier le recours à une plateforme numérique payante afin de profiter du réseau et de l’offre de cette plateforme.

Proposition n°8
Modifier le code de la route pour, lorsque l’AOM le souhaite, permettre de mutualiser un arrêt de transport en commun et un arrêt de covoiturage sur voirie. En effet, aujourd’hui, l’arrêt des véhicules particuliers est strictement interdit sur les « zigzags jaunes » peints sur la chaussée au droit des arrêts de transport collectif, ce qui limite très fortement la recherche de synergie entre covoiturage et transport en commun.

Proposition n°9
Les retours d’expériences des expérimentations menées par certaines collectivités montrent qu’une plateforme de covoiturage sera d’autant plus utilisée qu’un soin important aura été apporté à l’animation et à l’accompagnement de son fonctionnement sur le long terme. Il est par exemple essentiel d’aller à la rencontre des entreprises du territoire pour les convaincre de l’intérêt d’inscrire leurs salariés à la plateforme, ou d’aller à la rencontre des habitants lors d’événements de type marchés ou festivals pour leur présenter les services proposés.
À cette fin, l’État pourrait lancer un appel à projets destiné à participer au financement d’un ou plusieurs équivalent temps plein « d’animateurs covoiturage » au sein des AOM lauréates.

État des lieux du covoiturage en France
Le covoiturage est aujourd’hui défini dans le code des transports comme « l’utilisation en commun d’un véhicule dans le cadre d’un déplacement que le conducteur effectue pour son propre compte – et non pour procéder au transport d’un tiers à sa demande – à titre non onéreux ». Il relève de la catégorie des transports privés routiers de personnes.

Actuellement, les AOM ne sont compétentes que pour mettre à disposition du public des plateformes dématérialisées de covoiturage facilitant la mise en relation de conducteurs et de passagers (article L.1231-15 du code des transports). De ce fait, il est normalement impossible pour une AOM d’organiser elle-même un service de covoiturage, ni  même d’intégrer ce mode de transport à une délégation de service public mobilités. Elles ne peuvent pas non plus réserver une voie de circulation au covoiturage, ni créer des emplacements de stationnement sur voirie exclusivement dédiés au covoiturage.

Les gestionnaires de voirie peuvent quant à eux créer des aires de covoiturage, mais il existe de nombreuses AOM non compétentes en matière de voirie (communautés de communes, communautés d’agglomération, syndicats mixtes…).

Ainsi, la marge de manœuvre des AOM est très réduite à ce sujet, et ces dernières agissent généralement sous la forme d’expérimentations locales de différents services.
C’est ainsi que, ces derniers mois, plusieurs AOM ont décidé de subventionner certaines start-ups de covoiturage, soit directement au prorata du nombre de trajets réalisés (Île-de-France Mobilités), soit indirectement en mettant en avant ces opérateurs dans le cadre de plans de mobilités employeurs ou via des plans de communication spécifiques (Tisséo, SMTC Grenoble, Orléans Métropole…).
Ces actions ont rejoint celles menées depuis quelques années par de nombreuses AOM en matière de plateformes de covoiturage, certaines de ces plateformes ayant été intégrées dans les systèmes d’information multimodale et calculateurs d’itinéraires des collectivités.

17 décembre 2018 – Crédits : Schneider-Saada